On peut être surpris par les réponses qui nous parviennent quand on demande aux uns et aux autres les motivations qui se cachent derrière leurs choix de métiers. Alors que la plupart des gens font entendre que leur vocation leur vient d’un besoin bien particulier, certaines réponses, comme celle de Yann Cabello font réfléchir.
Il a laissé entendre qu’il a “toujours eu le sentiment qu’on échoue moins à témoigner avec des images plutôt qu’avec des mots”. Il a donc choisi la photographie comme métier. Un choix tout à fait logique si l’on tient compte de ses motivations.
Au nombre des activités qu’il propose, en tant que photographe portrait à Clermont-ferrand, il y a la formation photo. Il avait d’abord commencé en scop. Aujourd’hui il est micro-entrepreneur et salarié spécialisé dans la photographie des arts de la scène. Il s’est prêté à nos questions.
La dualité posée par cette question revient souvent, pourtant elle n’a pas lieu d’exister. Art et technique sont les deux faces d’une même pièce ; un peintre connaît nécessairement ses pigments, ses pinceaux, la théorie des couleurs… Pourquoi cela devrait être différent pour la photographie ? Les plus grands artistes, quelle que soit la discipline, sont également de grands techniciens. La technique permet d’ouvrir les portes de la créativité, de dire plus précisément ce que l’on souhaite raconter : essayez d’écrire un poème avec deux mots de vocabulaire…
La technique nourrit l’art et l’intention artistique nourrit la recherche technique. L’un ne va pas sans l’autre, il s’agit un peu du fond et de la forme, il n’y a pas à faire l’impasse sur l’un ou l’autre ; une intention narrative sans le support de la technique sera bien mal exprimée et perçue, tout autant qu’une photo sans intention narrative mais parfaite techniquement sera une bête image.
Le matériel est juste un outil, mais oui Canon est ma marque de prédilection depuis mon premier Canon AE-1. La raison est simple ; je travaille souvent en jpg pour l’actualité, sans la possibilité de retoucher les photos. Canon reste inégalé dans sa justesse des couleurs et la qualité de ses jpg. Le matériel est extrêmement fiable, impérissable. Ayant une passion pour l’équipement photo, j’ai sérieusement testé les autres marques, elle ont d’autres qualités, mais elle ne m’intéressent pas autant dans mon activité.
En ce qui concerne le noir et blanc, avant de parler d’oeuvres, il faut parler de lumière et de rapport de contraste. Toutes les photos ne fonctionnent pas forcément en noir et blanc, il faut une certaine densité, des niveaux de gris différenciés, sinon on se retrouve avec une photo grise et fade. Le noir et blanc est avant tout une affaire de conditions à la prise de vue. Si on peut forcer considérablement les choses en post-traitement, ceci laisse des traces et un sentiment de faux pour un oeil aiguisé. Pour ma part j’utilise le noir et blanc dès que je souhaite avoir un discours essentialiste, minimaliste, pour toucher le coeur de mon sujet. Donc tout sujet fait potentiellement un bon noir et blanc.
Le post-traitement existe depuis aussi longtemps que la photographie elle-même : il faut s’entendre sur le terme. Post-traitement = ensemble des opérations appliquées après la prise de vue. Le développement argentique est un post-traitement. Le développement numérique est exactement la même chose, on manipule les mêmes concepts, seul l’outil a changé, on passe de la chambre noire à un logiciel, voilà tout. La question post-traitement ne se pose pas puisque le post-traitement s’impose depuis toujours.
Par contre, le développement et la retouche sont des choses qui s’apprennent sérieusement, il faut avant tout aiguiser son oeil pour être capable de poser un diagnostic juste sur les opérations à mener. Ceci évite les traitements outranciers que l’on voit tous les jours sur internet. En argentique on pouvait confier ses pellicules à un labo, à un maître tireur, mais aujourd’hui en numérique le photographe doit avoir cette double casquette et fatalement être aussi maître tireur. Beaucoup font l’impasse sur l’apprentissage et ça se voit. Le véritable problème n’est pas le post-traitement donc, mais la maîtrise technique que l’on en a.
Comme dans toute discipline, la maîtrise technique n’est pas une option, à quelque niveau que ce soit, prise de vue et post traitement, le photographe a tout intérêt à se former sérieusement.
Pour en savoir plus : https://www.yanncabello.com/